Le cadre de vie est admirable, incitant à la rêverie, poussant à la sérénité. C’est sur un méandre de la Saône que les premiers Pagnotains ont installé leurs pénates, séduits sans doute, par les ressources qu’offraient le fleuve (on répugne à parler de rivière) et les terres de ses rives. Un barrage, dans les années 1970, a transformé la Saône en « délaissé » dans la traversée de la commune. On s’active aujourd’hui à lui rendre vie et activités…
On trouve trace de « Finis Pagniacensis » dès 874. L’appellation se transformera en « Paigné » (1134), puis « Paigniacum » (1168) et « Paigny » au XVIe siècle. La paroisse de Pagny-la-Ville regroupait Pagny-le-Château et Toutenant, son hameau, Labruyère et Lechâtelet. En 1257, Hugues de Vienne prit le titre de Vienne, seigneur de Pagny. Puis la baronnie passa à l’amiral Philippe Chabot-Charny, à son fils Léonor, lieutenant du roi en Bourgogne, aux Lorraine, etc. Louis de Lorraine vendit la baronnie de Pagny à Louis XIV pour 700 000 livres… De temps immémoriaux, l’économie villageoise reposa sur l’agriculture. En 1831, les Pagnotains étaient au nombre de 832 (635 au début du siècle) et vivaient pratiquement tous de la terre. Dans les années 1880, la famille Taupenot entreprend la construction d’une féculerie en bord de Saône. Tout naturellement, la culture de la pomme de terre va s’intensifier à la ronde, détrônant largement celle du colza. De tout le canton, on vient faire la queue devant la porte de l’usine pour attendre son tour de décharger les chars de patates. Mais si la prospérité de la féculerie allait croissant, ses installations n’évoluaient guère et lors d’une fabuleuse récolte, en 1925, le site fut le théâtre d’un tel encombrement que nombre de planteurs subirent des pertes importantes. Petit à petit, l’usine qui avait employé jusqu’à 160 ouvriers déclina pour fermer définitivement ses portes dans les années 1970. Un élevage de volailles l’a remplacée mais les bâtiments menaçent ruine…
Un malheur n’arrive jamais seul : à peu près à la même époque, les eaux « vives » de la Saône à Pagny-la-Ville étaient contraintes par un barrage et transformées ainsi en « délaissé », privant la commune de son activité batelière. Au grand regret des anciens et au grand dam du commerce local…Fort logiquement, en 1982, la population connaissait son seuil le plus bas (310 habitants), et il fallut attendre l’exode urbain et banlieusard pour que la paroisse retrouve des ouailles ! La mixité sociale est d’ailleurs exemplaire à Pagny : des familles modestes y côtoient des cadres supérieurs et des universitaires adeptes du télé-travail. Mais surtout, surtout, cette population a considérablement rajeuni. La présence à la tête de la commune de trois femmes (maire et adjointes), jeunes mères de famille, en est le symbole et l’illustration. Prolongeant l’œuvre entreprise par Hubert Gault, l’équipe municipale développe des projets originaux, prenant en compte un maigre budget, mais, en revanche, une forte intercommunalité cantonale. On évoque ainsi une requalification touristique du fameux délaissé (création d’un véloroute) celle des chemins de halage, on rêve d’une salle de sports cantonale à Seurre, on s’apprête à créer un emploi jeune, tourné vers l’environnement. Et puis on inaugurera le 2 juillet prochain l’orgue restauré par un facteur jurassien, l’occasion de réunir toute la commune pour lui faire découvrir et aimer ce magnifique instrument. Dans un village où une association joliment nommée l’Avenir redonne vie désormais aux fêtes traditionnelles, tant pour les petits que pour leurs parents, cet avenir-là s’annonce plutôt réconfortant.
Philippe CARAMANIAN (http://www3.bienpublic.com/)
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